Comment doit-on gérer une formation lorsque le meilleur joueur (de tous les temps?) nous quitte deux fois plutôt qu’une? C’est une question qu’on pourrait poser aux Cavaliers de Cleveland qui ont vu LeBron James quitter en 2010, avant de répéter l’exercice en 2018. À deux reprises, il a quitté le bercail pour aller soulever le Larry O’Brien ailleurs, sans que Cleveland puisse obtenir un retour puisqu’il n’a jamais été échangé. C’est difficile de bâtir une formation lorsqu’il est impossible d’obtenir une monnaie d’échange en retour de sa meilleure pièce. Pourtant, c’est ce que les Cavs ont dû faire à deux reprises…
Lorsque Colin Cowherd a mentionné que King James a pris la bonne décision de quitter Cleveland parce que la formation n’avait pas de futur, il n’était pas complètement dans le tort. N’ayant pas sélectionné un seul joueur depuis 2015 en raison des nombreuses visites en finale et des transactions pour amener des joueurs de talent pour épauler James, Cleveland a amorcé sa reconstruction en 2018 en arrêtant son choix sur Collin Sexton, un jeune point guard de l’université de l’Alabama au huitième rang. Une première sélection au premier tour depuis celle de Tyus Jones en 2015. Jones n’a jamais joué une seule rencontre pour Cleveland.
C’est donc vrai, le futur n’était pas très resplendissant à l’époque, surtout en regardant la formation qu’alignera Tyronn Lue avant d’être congédié en commençant la saison avec une fiche de 0-6.
Les noms que vous voyez sur cet alignement ne vous inspirent pas confiance? Vous avez pleinement raison. La troupe de Larry Drew, qui est venu en remplacement de Lue, a terminé la campagne au 14e rang dans l’Est (19-63). On est déjà bien loin de l’ère James…
Avec deux choix de premier tour en 2019, l’état-major se devait de viser dans le mille pour espérer un meilleur sort avec une formation qui se fait vieillissante et pour qui les meilleures pièces quittent peu à peu. C’est ce qu’ils ont fait en sélectionnant la deuxième pièce du duo Sexland en Darius Garland. Avec le départ de Kyrie Irving un an plus tôt, ça prenait un autre garde pour venir épauler Sexton qui a connu une bonne première saison dans le circuit en disputant les 82 matchs et terminant au troisième rang des meilleurs pointeurs derrière Love et Clarkson. Darius Garland s’amène à Cleveland en ayant connu une saison en NCAA ternie par les blessures, en plus de Dylan Windler qui fut le deuxième choix de premier tour de l’organisation.
On se rappelle très bien des deux derniers joueurs à avoir été sélectionné au premier tour dans la même année du côté des Cavs, et on ne souhaite pas reproduire la même erreur. En 2013, Anthony Bennett et Sergey Karasev s’étaient joints à l’organisation de l’Ohio. Clairement, avec le recul, on peut affirmer que ce fut un désastre. Cependant, le dicton jamais deux sans trois s’est appliqué à cet encan puisque Cleveland a transigé QUATRE choix de deuxième tour aux Pistons pour mettre la main sur Kevin Porter Jr. avec le 30e et dernier choix du premier tour. Une sélection qui aura bien fait mon bonheur à l’époque avant de voir KPJ être pratiquement donné aux Rockets au début de 2021. Quelle bévue!
Attention à vos yeux, outre l’ajout de Darius Garland, Dylan Windler et Kevin Porter Jr, la formation de John Beilein, puis de J.B. Bickerstaff est difficile à regarder. Parce que quoi de mieux que quatre entraîneurs différents en un peu plus d’un an pour bâtir une chimie auprès d’une formation qui se cherche. Bien sûr, dans l’impossibilité de prendre un momentum au courant de l’année, les hommes des deux entraîneurs terminent au fond du classement (19-46).
Étant un tout petit peu malchanceux à la loterie, c’est le cinquième choix qui appartient aux Cavaliers pour une deuxième saison consécutive. Depuis 2018, on ne peut pas dire que Cleveland repêche mal, loin de là. Outre Windler qui n’a pas joué jusqu’à présent, mais qui amorcera sa carrière en NBA en 2020-2021, les sélections de la formation font du sens. Deux gardes et un joueur de périmètre en Okoro qui amène non seulement des points, mais aussi un aspect défensif apprécié pour une formation qui en arrache avec le deuxième pire defensive rating la saison précédente.
Arrivons-en au fameux plan. Ce plan de reconstruction passe bien sûr par le repêchage pour une formation qui ajoute des pièces à gauche et à droite qui ne viendront pas réellement aider l’équipe sur le long terme. Je parle ici de l’ajout d’Andre Drummond qui a amassé de bonnes statistiques avant de se rendre compte qu’il n’avait pas affaire à jouer à Cleveland en premier lieu. L’expérience fut courte dans son cas puisqu’il quitta vers Los Angeles après le rachat de son contrat.
C’est un geste qui fait sourciller les partisans de la formation puisque son ajout n’a même pas été dans le but de l’inclure dans le futur de la formation. Il a simplement été de passage, un passage inutile pour une équipe qui doit se projeter dans le futur. Malgré tout, il a été l’un des meilleurs joueurs au niveau de la production, derrière un Collin Sexton qui s’affirme tranquillement comme une jeune puissance offensive à sa troisième saison dans la grande ligue.
Autre bonne nouvelle, on peut apprécier les premiers pas de Dylan Windler dans l’organisation des Cavs en plus de l’arrivée de Jarrett Allen, qui lui vient remplacer Drummond à plus long terme. Son entente de 5 ans / 100M$ pourrait devenir un véritable vol, ou bien un fardeau dans quelques années. C’est le risque d’offrir un contrat de la sorte à un jeune de 23 ans.
Kevin Love est sur la pente descendante, et quitter Cleveland semble devenir la priorité via une transaction. Les Cavaliers devront sans aucun doute se procurer un mauvais contrat en retour, mais la possibilité d’ajouter un jeune ou des choix de repêchage en retour devient alléchante pour une formation qui peut toujours compter sur un jeune noyau qui prend ses aises dans la NBA.
Le plan est toujours abstrait, notamment en raison du nombre élevé de joueurs qui ne cadrent toujours pas avec le futur de l’équipe, mais la situation de Kevin Love devrait en dire beaucoup à savoir si Cleveland regrettera une autre fois de laisser partir un joueur. Au moins, ils devraient être en mesure d’obtenir un retour contrairement aux deux départs de LeBron.
La plus récente pièce du casse-tête est déjà en place pour venir remplacer le vétéran, alors que Lauri Markkanen s’est amené à Cleveland. Finalement, le nouveau venu n’aura pas été une addition très coûteuse et amène de la profondeur à ce frontcourt déjà composé d’Evan Mobley et Jarrett Allen. Pour moi, il viendra permettre à Mobley de se développer à son rythme et d’embrasser un rôle plus facile. Il n’aura pas la pression de produire directement puisqu’il sera entouré de jeunes joueurs qui ont déjà de grandes ambitions et qui ne souhaitent pas se retrouver dans le bas du classement comme ce fut le cas depuis deux ans.
Le contrat de 4 ans / 67M$ qui a suivi est une autre bonne nouvelle puisqu’il permet aux Cavaliers d’obtenir un joueur qui peut amorcer des rencontres en attendant que Mobley soit prêt à prendre le relais au poste 4.
Après deux années de misère à voir défiler les entraîneurs, à ne pas trop comprendre la direction que prendra l’équipe et à souhaiter un miracle pour remporter plus de 20 matchs dans une saison, il est enfin temps d’être excité pour une nouvelle saison.
L’ajout récent de Tacko Fall ne vient pas chambouler la formation de mon côté puisqu’il n’obtiendra que très peu de minutes. Il ne sera pas un facteur déterminant cette saison. Il demeure un projet en développement qui n’a vraisemblablement pas fonctionné à Boston.
Outre Kevin Love, qui pourrait ne même pas amorcer la saison en Ohio, aucun joueur n’a plus de 27 ans pour le moment. C’est la preuve que le plan est sur la bonne voie. En plus de tout ça, l’état-major possède toujours l’entièreté de ses choix de premier tour jusqu’en 2028, offrant la possibilité de poursuivre ce fameux plan qui penchait dangereusement vers un désastre il y a quelques années, mais qui laisse présager de meilleurs jours dans le futur.