Chronique

La délivrance de Stephen Curry

Steph Curry à la poursuite de son propre record
Crédit : AlleyOop360

En résumé

Les critiques à son égard des dernières années l'ont motivé à se rendre jusqu'au bout.

Après six présences en finale de la NBA, quatre titres et deux défaites crève-cœur, Stephen Curry est enfin MVP de la finale. Lorsque le commissaire adjoint de la NBA a prononcé le nom tant attendu, tous les commentaires des détracteurs, les critiques des plus irréductibles et surtout la trame narrative que Stephen Curry n’est pas un joueur des grands moments se sont dirigés où ils se devaient : à la poubelle.

Il suffit de regarder la réaction de Curry, mais aussi de ses coéquipiers pour réaliser l’ampleur, l’importance de ce sacre pour Curry. Les sceptiques et les détracteurs étaient nombreux. « 2015 était un coup de chance avec les blessures, 2016 montrait la véritable nature des Warriors sans Durant. » « Curry n’est pas un joueur des grandes occasions, il performe mal au printemps. »

Combien de fois est-ce que j’ai pu lire ce genre de commentaires? Si j’avais reçu un dollar à chaque fois, je serais probablement en mesure d’amener une franchise NBA à Montréal. Eh bien il semblerait que Curry et les Warriors aussi ont entendu ces remarques. Ils l’ont même proclamé haut et fort, c’était leur motivation, leur carburant.

Ce quatrième titre, sans Durant, avec une équipe construite autour du chef et pour le chef, démontre qu’il est possible de construire une franchise autour de Curry et que son style de jeu permet de remporter les grands honneurs de manière décisive.

Dans une ligue dominée par les ailiers physiquement surpuissants, les Warriors ont construit leur équipe autour d’un meneur maintenant presque incapable de dunker et d’un arrière capable de marquer 60 points en dribblant 10 fois. Dans une ligue connue pour constamment épier et copier les équipes gagnantes, Golden State a complètement cassé le moule et laissé son joueur étoile révolutionner la ligue, mais aussi le sport.

Un CV pas comme les autres

Il s’agit bien d’une révolution les amis. Il y a un avant et un après Steph Curry et c’est pour ça que ce titre de MVP des finales est le point d’exclamation sur une carrière à laquelle il ne manquait que cela. Curry ne sera pas le meilleur meneur statistiquement, il ne terminera pas avec pratiquement 40 000 points comme LeBron James (si ce n’est pas plus), il ne terminera pas avec 15 806 passes comme John Stockton.

Bien sûr, il terminera avec le record pour les tirs à 3 points, car il a pratiquement réinventé ce tir et son utilisation par les équipes. Toutefois, ce qui fait la force du CV de Steph Curry lorsqu’on le compare aux autres grands, c’est sa capacité à faire gagner son équipe. Quatre titres en huit ans, 73 victoires en une saison, une garantie presque totale de remporter 50 matchs avec Curry comme première option, une stabilité et une générosité envers ses coéquipiers qu’on ne reverra peut-être jamais. Tout ça dans une ligue plus compétitive que jamais et en demeurant toujours avec la même concession.

Steph Curry est un peu le Tim Duncan des meneurs. Il est plus étincelant et son zénith est à des années-lumière de celui de Duncan, mais dans sa volonté de vaincre, sa capacité à prendre du recul pour le bien de l’équipe, sa relation avec la direction et son entraîneur, l’espèce d’attraction lui permettant de tenir le même groupe ensemble depuis aussi longtemps, il ressemble énormément à Duncan.

Quel impact pour l’héritage de Curry?

Ce titre est majeur pour la carrière de Curry. Il lui permet de solidifier sa place comme deuxième meilleur point guard de l’histoire et ouvre même la porte à une course pour la première place. Pour le moment, Magic Johnson est toujours premier, ce serait être prisonnier du moment de dire autrement, mais les CV deviennent de plus en plus similaires et chaque titre, chaque record, chaque performance historique rapproche Curry du meneur format géant des Lakers.

Ensuite, Curry vient d’ouvrir d’un solide coup de pied la porte du top 10 des meilleurs joueurs. Je crois qu’il est probablement 9e ou 10e à l’heure actuelle, mais avant ce titre, je ne pouvais pas encore me permettre de déplacer les légendes devant lui.

Finalement, ce titre permet à Curry de rivaliser avec LeBron pour le titre du joueur de la décennie 2010. Il a désormais autant de championnats, il a battu James trois fois en finale et perdu une seule fois contre lui, il a autant de MVP dans les années 2010 que James et surtout, Curry a eu un impact plus grand sur la manière que le basketball est joué que LeBron James. Un peu comme Larry Bird avec Magic Johnson, simplement de pouvoir être dans la discussion avec un joueur d’un tel calibre est bénéfique pour sa réputation et son héritage.

L’importance de savourer le moment

Profitons du moment, profitons de ces grands joueurs qui foulent les parquets de la NBA actuellement. Nous avons la chance de voir évoluer une quantité jamais vue de talent soir après soir. Qui sait ce que le chef nous réserve pour l’avenir? Le bougre pourrait jouer jusqu’à ses 40 ans et prendre Jordan Poole, James Wiseman et Jonathan Kuminga sous son aile, il pourrait encore nous surprendre et réaliser l’impensable en remportant un cinquième titre l’année prochaine? Pourrait-il être le premier joueur depuis Steve Nash à remporter un MVP après l’âge de 30 ans? Ce titre démontre qu’il ne faut pas parier contre le chef!

C’est un peu ça la beauté de la NBA. Le cycle est éternel, la roue tourne. Les succès d’hier ne sont que cela et le lendemain du titre, les joueurs ont faim pour le prochain, les entraîneurs repensent à leurs erreurs et les DG se tournent vers le repêchage et les joueurs autonomes.

Attention à ne pas tomber dans le piège toutefois et de rester en mesure de savourer le moment. Partisans des Warriors et de Curry, félicitations et bon été. Pour les autres, à l’année prochaine et meilleure chance la prochaine fois.

AlleyOop360

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